
Le recueil Le Divan Double, publié par les éditions Unicité en juin 2024 dans la collection Chantelangue & Compagnie dirigée par Laurent Desvoux-Dyrek, est devenu un spectacle musical. Après une première représentation en janvier 2025 à Paris, il va être renouvelé et joué à Belle-Île-en-Mer pour le festival Les moments musicaux. Les répétitions ont recommencé. L’occasion de s’interroger…



A quoi servent les auteurs des poèmes lors d’une répétition ? C’est la question que nous nous posons à chacune d’elle, devant les musiciens, l’interprète, la récitante, et surtout « aux côtés » du « directeur musical », c’est-à-dire la personne à l’origine du projet musical, et qui, par le choix des partitions, des affects qui colorent (il est plus juste de dire recolorent) les vers tirés du recueil, régit et compose le spectacle. Cette question n’est pas rhétorique. Elle reflète une véritable interrogation. Quelle est notre place ? Quel est notre rôle ? Au-delà, quels sont les rôles de chacun dans la conception du spectacle ?
D’abord, de notre strapontin (métaphoriquement l’endroit que nous aurions choisi pour écouter chacun), en retrait du « directeur », nous attendons le moment de notre intervention.
Lorsque la récitante parle sur la musique, le directeur vérifie que phrasé et rythme soient calés sur les notes : c’est sa prérogative, il a arrangé leur rencontre, là où musique et voix (hors chant) pouvaient se combiner. Il a compris et interprété l’intention des auteurs, il a une idée précise de l’intonation qui en renforcera l’émotion.

Parfois, d’un regard en biais, vaguement inquiet, il interroge l’un des auteurs. L’intention du texte lui échappe. L’un de nous (selon le texte) sort de l’ombre, improvise une réponse en mobilisant l’émotion qui présidât à la rédaction d’un vers, tente avec quelques images d’affermir l’interprétation. Rôle ingrat mais nécessaire, où il faut colmater une brèche avant que le doute ne s’infiltre comme un filet d’eau dans les yeux de la récitante. Plus tard, cet instant reviendra en mémoire. Que ne pouvons-nous, nous-aussi, d’un regard ou d’un filet de voix, transmettre le sentiment juste à celle qui prête ses lèvres au poème ?


Parfois l’un des auteurs, Aline, rêve d’une conversation hors répétition avec la récitante, de lui conter ce très long voyage ponctué des premiers textes, le chemin de sa voix qui lui a été ainsi offert. Parfois, l’un des auteurs, Philippe, rêve d’un dédoublement, d’une récitante qui serait chanteuse, d’une chanteuse qui serait interprète, deux personnes sur scène, se regardant jouer l’une et l’autre, vivre l’émotion, le dédoublement (puisqu’il s’agit du thème du divan double), de celle qui aime et a aimé. Ainsi, la répétition devient retour, souvenir du moment de l’écriture, don d’une émotion.

Informations pratiques : festival Les Moments musicaux de Belle-Île-en-Mer, avec Stefan Cassar, Le Palais, Chapelle Saint Sébastien 45 avenue Carnot, 19 aout 2025 puis au Patronage laïque Jules Vallès, Paris XVe, 16 janvier 2026.


