Finir

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Une animatrice d’atelier m’avait un jour suggéré un texte titré Mademoiselle Encours (c’était l’époque surannée et coupable où l’on disait encore mademoiselle). L’idée était, je crois, de me faire travailler ce qui m’empêchait de terminer un écrit. De mettre un point final. Kafka écrivit dans son journal intime : Je n’arrive à rien finir, parce que je n’en ai pas le temps et que cela urge tellement au fond de moi. Sans me comparer à Kafka, je ne peux que lui donner raison. Tout court en décalage, surtout aujourd’hui, le temps mesuré par mes divers calendriers (Outlook, gmail) et celui que mon esprit met à saisir ce que je voudrais écrire (bien que je sois passée des carnets aux mails qu’on s’envoie, voire à l’enregistreur vocal du smartphone.)

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Fleur

1991

Leitmotiv, ma fleur d’éphémère, effarante, affolante douceur, dédale de chair parfumée, demi-ombre dans les lampes, réceptacle des corps traversés par des phrases que défont mes transports immobiles.

Leitmotiv, ma douleur dans laquelle ton visage attentionné puise sa limpidité, désir de cette fleur à tes côtés, affolante, effarante, éphémère douceur de l’éclosion incessamment renouvelée de celle que tu effleures.

2022

Leitmotiv, ma fleur de chair effarante, nécrophage, fleur de phrases perdues dans un dédale de silence, lèvres suppliantes de la douceur de tes mains et de ton visage améthyste, au parfum de nos sexes emmêlés.

Leitmotiv, ma fleur affolante de chair immobile, paroles et désirs assourdis, éphémère douleur de l’absence, attente de l’éclosion de l’obscurité dans ta demi-tombe où tu m’effleures toujours.

Deuil

Recueil

1991

Je suis tout ensemble, immobilisée devant ta porte, creusant à tes côtés l’abîme de mon corps ouvert, et dans les métros qui l’enlèvent et le ramènent à ton sexe pour un acte rêvé, la brève et douce exubérance distend chacun de mes instants en une vie de souvenirs futurs, entêtante douleur d’un amour d’ores et déjà endeuillé.

2022

Immobile, j’attends devant la porte l’invite secrète à creuser à ton côté l’abîme de mon corps. Je me déshabille en prolongeant ton regard sur ma nuque, et ma poitrine ouverte. Ton sourire flotte douloureusement sur les vitres de mes wagons d’oubli. J’oppose, pour le briser, mes plaintes à ton silence, tes mains lancinantes en deuil de mon sexe.

A propos du sens des mots

Nos phrases se lèvent. Elles sont le vent qui déplace les nuages, qui les entraînent de gauche à droite sur l’horizon. Des lignes neuves apparaissent, le grain de la falaise qui nous surplombe, la couleur mordorée du champ de ce côté-ci, l’ondulation verte des collines jusqu’au bout de ce monde. L’ombre abandonne la terre, l’ombre abandonne notre âme. Nous nous dévoilons, nous décidons, nous osons, étourdis de notre propre audace. La deuxième phrase peut alors naître. Tout le temps que la plume avancera, les nuages courrons dans le ciel. Ils seront notre paysage et nous chercherons les mots dans leurs rebords. Puis nous nous perdrons dans l’épaisseur noire des orages prochains. Notre âme se serrera. Nous nous cacherons, nous nous protégerons. Un épais silence précède le fracas de la pluie. Aline Angoustures

J’ai créé Le sens des mots en 2016. La ligne éditoriale du blog a tout de suite été de sortir du silence, des éléments de langage, des mensonges ou du brouhaha pour faire émerger le sens des mots, en poésie, en littérature et dans la société. Je me suis ambitieusement placée dans la ligne d’Albert Camus pour qui Mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur du monde

La ligne éditoriale étant posée, le choix était de faire un article par mot et des titres d’un seul mot. Dans la rubrique poésies le mot permettait de découvrir un poème et donc un auteur ; dans la rubrique vivre.com des textes courts et personnels sur un verbe et ses évolutions, sur un ton humoristique; dans la rubrique lectures des comptes-rendus de livres éclairant le sens d’un mot ; dans la rubrique société de longs articles sur un mot d’actualité ; enfin une rubrique bref pour de très courtes chroniques et l’inévitable reblog pour diffuser des articles d’autres blogueurs.

Cette aventure m’a beaucoup appris. J’y ai surtout retrouvé des amis poètes ou écrivains, rencontré des poètes, des auteurs, des débatteurs et enfin des amis et je veux ici rendre hommage à des blogueurs qui sont devenus très vite des amis réels et non seulement virtuels : Cincinnatus, Pierre Yves, Mots surannés, furent les premiers et il y en a tant d’autres. Merci à eux et à tous ceux qui me « suivent » comme on dit ici…

Le blog a repris depuis 2022 et nous sommes désormais deux à le tenir. Je m’appelle Aline Angoustures, je suis femme de papier, historienne, archiviste et, en parallèle de ma vie professionnelle, j’écris de la poésie et de la fiction depuis longtemps. J’ai publié des poèmes en revue, et des nouvelles. Philippe Moron est ingénieur et, en parallèle de sa vie professionnelle, a suivi une formation d’arts plastiques en Allemagne pendant sept ans et écrit de nombreux textes de fiction. Nous avons commencé à travailler ensemble par la relecture mutuelle de romans en cours, activité qui se poursuit mais à laquelle s’est ajoutée l’écriture de poèmes à quatre mains.


Cette complicité nous a conduit à reprendre le blog ensemble. Sa ligne éditoriale est resserrée autour de la poésie, notamment à quatre mains (rubriques Miroirs et Poésie), et de l’écriture de fiction. La rubrique vivre.com se poursuit. Nous publions un article par semaine ou tous les quinze jours, le vendredi.

Il me reste à remercier tous les lecteurs fidèles, et nouveaux, de ce blog et leur dire combien leurs commentaires nous enrichissent.