Solitude

1992

Je désire faire le lent voyage des amants pénitents
Fouler les canopées noircies par le vol des arondes
Et aborder ton corps dans l’ivresse des échouages nocturnes

Mais il n’y a plus de rivage
Il n’y a plus de terre vers laquelle revenir
Il n’y a plus d’enfance heureuse où faire souvenir
Il n’y a que tes bras dans lesquels j’apprends jour après jour à te perdre.

2022

Abri, patience, atome anéanti, l’hallucination me précède dans l’espace ductile du désir

J’accroche les fentes de ton regard dans le maelstrom lent et saccadé du temps

Ma chair de froide perle s’est faite seule caresse, au soir tremblé de solitude

Citadelle

1991

Citadelle de mots, fusion de langages, tu tournes sans cesse en toi-même les phrases douces qui bercent l’enfant immobile.

Elles l’entourent, le protègent et l’encerclent, elles déroulent avec elles le silence qu’elles remplacent autour de l’enfant, de la femme.

Tes mots ont entrouverts mes bras et mes lèvres, je me suis enivrée d’une phrase sans fin, jour après jour, louange et blessure, déferlante infinie.

Les noms que tu essaies à nos désirs muets engendrent sous ton regard cette femme qu’ils désarment et pénètrent.

2022

Je suis la citadelle dont tu souffles les échos dans la fusion des temps, hier et aujourd’hui de nouveau réunis, aussitôt séparés.

Tu tournes en nous les phrases charnelles que j’enroule autour de mes lèvres, pour te protéger de la mort et m’encercler avec lui.

Tes paroles réveillent chaque jour la blessure que nous tenons secrète, il nous écoute gémir et nous enivrer de notre gémellité fausse.

Nous devenons une femme sous son regard et ses mains, toi l’enfant douce du silence et moi la femme attentive à la berceuse oubliée.

Transfert

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Le divan de Freud

Ce texte est un poème d’amour d’un genre particulier, puisqu’il tente d’évoquer l’amour ressenti pour un psychanalyste dans le cours de la thérapie. C’est pourquoi je l’ai appelé transfert, ce mot issu de l’allemand Übertragung (report) désignant l’ensemble des sentiments ressentis par le patient à l’égard de son analyste. En anglais, on emploie le mot transference et en espagnol transferencia).

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Pénétration

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Pénétration est le titre choisi pour son poème par Hélène Picard (1873-1945). J’ai hésité à préférer le mot désir pour parler de ce texte en alexandrins que j’aime beaucoup, mais il me semble moins adapté que celui choisi par l’auteur. Le texte évoque beaucoup plus l’amour réalisé, tant sentimental que physique. On y trouve à plusieurs reprises des images qui justifient le titre, même si le mot lui-même est absent dans le corps du texte.

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Escalier

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Quoi de plus ambigu, étrange et inquiétant qu’un escalier ? Voilà ce que dit si bien ce poème en prose de Jean Tardieu « Souvent j’oubliais». Partant de l’oubli « du sens des actes les plus simples », il évoque d’abord avec beaucoup de drôlerie des confusions qui nous sont familières, qu’il s’agisse de gestes ou de phrases, avant d’en venir, en haut d’un escalier, à un trouble singulier. Peut-on vraiment descendre un escalier sans crainte ? Et vous, avez-vous un poème sur l’escalier ?

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